Présentation
Adossée aux pentes du Wangenberg qui culmine à 391 mètres, la petite ville de Wangen semble plongée dans une paix qui fait penser au décor d’un conte.
Le grand axe nord-sud du piémont des Vosges, la Nationale 4 ignore le village et passe à l’est, la Départementale 142 reste plus au sud. Du coup Wangen est sagement à l’écart du bruit et des tracas de la circulation. Pour la préserver encore davantage, les deux portes médiévales de la cité veillent et interdisent tout chargement et passage en hauteur. Pour le promeneur, Wangen va devenir un coin de terre à explorer en toute quiétude.
Lorsque le visiteur arrive sur Wangen en grimpant la cote depuis la vallée de la Mossig, il se retrouve obligatoirement devant le “Niedertor”, la porte basse. Jusqu’au XVIIème siècle un fossé large de 15 mètres et profond de 6 défendait l’approche. Ce fossé était sous eau, alimenté par un ruisseau. A l’extérieur des murs, sur la petite placette en face de la mairie, voici la pierre du pilori avec la chaîne à laquelle étaient attaché les condamnés. Quant à la tour, avec son appareillage en grandes pierres à bosses, elle remonte sans doute à la fin du XIIIème siècle. Une double porte en bois permet le passage. Un veilleur, le “Torwacht” était chargé de fermer les portes de la ville une demi-heure après que l’angélus ait été sonné. Le gardien se rendait ensuite chez le Schultheiss pour lui remettre les clés. Dès lors, plus personne ne pouvait entrer ni sortir jusqu’au lendemain. Le portier effectuait ses rondes pour assurer la sécurité, surtout veiller à l’extinction des feux. De sa voix monocorde, il annonçait les heures.
Dans le village de suite après le passage du Nierdertor, prenez la rue à gauche : la rue Basse. Elle est à pente légère et passe devant le “Freihof”, la cour de l’abbaye Saint Etienne. En ressortant de la cour du Freihof et en continuant dans la rue Basse, on débouche sur la rue du Château qui forme une vaste boucle autour de l’ancien site du château, le coeur de la cité. Un regard tout droit sur le vaste jardin où se dressait jadis le bourg octogonal et dont il ne reste plus de traces apparentes. Des fragments de sculptures, linteaux de fenêtres, tout cela de style Renaissance sont incorporés aux maçonneries de plusieurs maisons de Wangen.
Par la rue du Lieutenant Heid en face de l’Eglise, on peut remonter sur le site d’une seconde porte de la ville, le “Motscheltor” qui ouvrait sur les vignes. La porte fut rasée en 1887 et seul le jambage d’un montant de porte marque encore sa position.
Au bout de la rue du Colonel Moll, on arrive sur la troisième porte de la ville, le “Sondertor” ou le “Sommertor”. Elle est placée au sud-est de l’enceinte mais fut totalement remaniée au XVIIème siècle On voit bien encore les piedroits de la porte médiévale.
Il faudra sortir de Wangen pour admirer le Sondertor de l’extérieur et voir ses deux cannonières à redents (XVIè).
Pour avoir un regard circulaire sur tout le village, il faut monter au Wangenberg en suivant les sentiers fléchés par le Club Vosgien. De là haut vous pouvez aussi voir la gorge du Kronthal mais aussi le magnifique vignoble qui entoure Wangen.
Un peu d'histoire
Les premières traces écrites de l’Histoire de Wangen remontent au 8ème siècle, quand Adalbert, le frère de Sainte Odile, reçoit la ferme “Wanga” du roi Chilpéric II, roi d’Austrasie. Adalbert fonde alors vers 722 l’abbaye de Saint Etienne dont la première abbesse est Sainte Attale, sa fille.
Wanga est donnée en possession à l’abbaye de Saint Etienne et devient ainsi une “colonge”, c’est-à-dire une organisation rurale particulière à l’Alsace et à quelques pays rhénans. C’est une communauté rurale avec des terres concédées à des preneurs moyennant un cens ou des prestations annuelles
Par un décret d’immunité, le propriétaire de la colonge seul, l’abbesse de Saint Etienne, a le pouvoir de justice, le droit de lever des impôts. Exempte de toute autre juridiction que celle des abbesses, Wanga est une “cour franche”, “Freien Dinghof” d’où le nom de “Freihof” qui existe toujours.
A Wangen, le “vieux Freihof” désigne le grand bâtiment qui était la résidence de l’Abbesse avec sa cave, sa vieille cour, son puits.
Les armoiries de Wangen représentent Saint Etienne.
Depuis le 8ème siècle, la ville de Wangen, l’abbaye de Saint Etienne et le vignoble cité pour la première fois en 742, ont leur destin lié pendant plus de 10 siècles.
Au niveau archéologique, des tombes de l’époque carolingienne ont été découvertes vers 1900 et en 1927 pendant les travaux de terrassement pour le construction de la route reliant Wangen à la gare au Kronthal.
La donation a donné lieu à quelques faux en écriture entre 848 et 1050. Lothaire a confirmé la donation en 845 et l’évêque Werner de Strasbourg la proclame au début du 11ème siècle en rendant à l’abbesse Lyntraud de Saint Etienne tous les droits et toutes les possessions qu certains évêques avaient dérobés entre-temps.
La famille “de Wangen” apparaît au 12ème siècle avec le nom de Wilhelm de Wangen qui est décédé en 1124 au cours d’une croisade durant le siège de Tyrus et celui de Hetzel de Wangen, ministériel de l’abbaye de Marmoutier en 1147.
En 1212, l’empereur Frédéric II de Hohenstaufen, arrive d’Italie en Alsace. Il y séjourne jusqu’en 1220 ; il établit des liens avec la noblesse locale et l’abbaye de Saint Etienne.
De l’église romane de 1214 construire en son honneur par l’abbaye de Saint Etienne, il nous reste le tympan sur lequel figure le nom de “Frédéric” et qui est une des pierres les plus remarquables d’Alsace.
Depuis le milieu du 13ème siècle, Wangen possède un château octogonal ayant sensiblement la même architecture que le Castel Del Monte en Sicile (influence des architectes de Frédéric II). Ce château était situé au centre du village, protégé par plusieurs enceintes avec un diamètre de 100 mètres. C’est une possession épiscopale donnée en fief à la famille noble des Wangen.
C’est vers le 13ème siècle que les murailles qui entourent le village sont élevées. On ne connaît ni la date, ni la charte qui a autorisé la communauté de Wangen à s’ériger en ville. Les enceintes sont mentionnées pour la première fois en 1297.
Durant le 13ème siècle la viticulture de Wangen est déjà très développée et pas moins de 5 abbayes y possèdent des vignes : Hahnau, Wissembourg, Saint Etienne, Schwartzbach et Obersteigen. Les exportations de vin se font par Strasbourg, via le Rhin sur Cologne qui est la plaque tournante pour le négoce du vin vers l’Angleterre, la Norvège, la Russie.
Malgré les fortifications, la cité de Wangen sera prise plusieurs fois :
- En 1375 par les Anglais, mais le château résiste
- En 1420 durant la guerre de Dachstein, la ville et le château sont brûlés. Hartung von Wangen le fait reconstruire.
- Le 30 septembre 1444 les Armagnacs prennent la ville et le château par surprise. Le 4 octobre, les Strasbourgeois, mécontents, font le siège devant la ville, délogent les derniers ennemis, brûlent la cité mais le château résiste. Une tourelle du mur d’enceinte porte le nom de “Geckenturm” (arme Gecken signifiant Armagnacs pour les Alsaciens)
- En 1514, les bourgeois de Wangen attaquent le château et ravagent les jardins. Les nobles se réfugient dans le donjon.
- En 1592, les Lorrains envahissent Wangen. La plupart des bourgeois se réfugient à Westhoffen, en laissant les caves avec les tonneaux remplis de vin à disposition de l’ennemi. Tôt le lendemain, une rumeur de contre-attaque des Strasbourgeois se répand. Les Lorrains quittent précipitamment la ville de Wangen, sauf seize des leurs, ivres mort, et qui sont égorgés sur place par les bourgeois revenus de Westhoffen.
Pendant la guerre des paysans, en 1525, Wangen est épargné n’ayant pas fourni de soldats aux belligérants.
L’introduction de la Réforme se fait vers 1520 et les chroniques nous rapportent que “le vendredi après Pâques de l’an 1525, le maire de Marlenheim fait part que dorénavant, durant les offices, la population boira le même vin que le curé, comme le font déjà les populations de Wangen et de Kuttolsheim”.
En 1564 les Von Wangen quittent la ville et vendent le château à l’abbaye Saint Etienne. Ils s’installent à Strasbourg, place Saint Etienne.
En 1580 Odile de Durmentz fait reconstruire et agrandir l’église. Il reste une dalle de pierre située sur le mur arrière de la tribune, dans l’église, louant cette reconstruction.
La guerre de Trente Ans (1618-1648) n’épargne pas la cité. Dès 1622 elle est occupée par les troupes de l’Archiduc Léopold d’Autriche, décimée par la peste (194 morts) en 1626, rançonnée par les Croates en 1627, molestée par les Suédois en 1628 et réoccupée par les troupes françaises de Turenne en 1643 et 1646 (4 compagnies !).
De 1674 à 1681, des impositions de guerre très lourdes pèsent sur le village qui est occupé en septembre 1675 par les Autrichiens. Les Pandours y passent en 1744 (il reste le “jardinet des Pandours” situé au Freihof). En 1784, la peste continue ses ravages et cause la mort de 121 personnes. Inévitablement, durant cette période trouble, on assiste au déclin du vignoble.
1683 marque le début de la contre réforme. Le 5 avril 1686 le choeur de l’église est mis à disposition des catholiques et c’est le début du Simultaneum, toujours en vigueur actuellement.
En 1789, date de la Révolution, les droits féodaux sont abolis et les habitants refusent d’acquitter les 600 mesures de vin de l’impôt appelé Bodenzins. Par un inventaire de 1791, on apprend que la cave du Freihof avait une capacité de 4.894 ohme ! (1ohm = 50 l).
De nombreux procès eurent lieu et ce n’est que le 6 avril 1830 que la Cour de Cassation de Colmar donne gain de cause aux bourgeois de Wangen défendus par Jean-Georges Strohl, Charles Moll et Christian Ostermann. Les habitants de Wangen décident de commémorer cet évènement tous les ans le 3 juillet en faisant couler gratuitement 250 litres de vin de la fontaine construire pour l’occasion.
En 1830 l’église existante est démolie puis reconstruire, agrandie sous sa forme actuelle.
En 1833 la chapelle Sainte Croix, située à l’origine dans les vignes, puis installée comme ossuaire à côté de l’église est définitivement construite dans la rue Basse.
A partir de 1848 la surface du vignoble s’agrandit. Elle passe de 72 hectares à 200 hectares en 1893 pour retomber à 53 hectares en 1953 (actuellement les vignes occupent 80 hectares).
En 1857 Wangen se plaçait en 35ème position sur l’ensemble de l’Alsace, devant Westhoffen et Marlenheim.
Wangen possède toujours des maisons typiques de vignerons. Elles ont de hautes caves, des soupiraux à glissières et de nombreux emblèmes (vigneron, tonnelier….).
De 1791 à 1953, le Freihof a changé souvent de propriétaire (particulier, …). Depuis 1953 il est acquis par la Fondation protestante, “le Refuge”, et devient un foyer d’accueil pour des personnes en difficulté.
Au lieu-dit “Wangenmuhl” se dresse le Castel des Garat, habité en 1871 par le Baron de Garat, directeur de la Banque de France qui avait épousé la fille de Schulmeister, l’espion de l’empereur Napoléon 1er.
L’actuelle mairie date de 1902.
Article publié par la Mairie de Wangen